La vénération eucharistique dans la réforme anglicane au XVIe siècle
M. Michael Davies (Angleterre)
2ème colloque du C.I.E.L. - octobre 1996

Michael Davies, président de l'organisation internationale Una Voce, a enseigné pendant 30 ans. Il est l'auteur de 12 livres sur les questions liturgiques, en particulier à travers leurs aspects historiques. Il a publié plusieurs ouvrages sur la réforme anglicane et effectue de nombreuses conférences dans le cadre de l'association qu'il préside, à laquelle le Cardinal Ratzinger vient d'envoyer le message suivant : "La fédération internationale Una Voce a joué un rôle important dans le maintien et l'usage des éditions du missel romain de 1962, en conformité avec les directives du Saint-Siège. Pour ce précieux service, j'exprime ma gratitude aux membres de la fédération et leur accorde ma bénédiction".

En Europe continentale, les réformateurs protestants du XVIe siècle voulaient changer la religion existante. A propos de ces prétendus réformateurs qui, en réalité, étaient des révolutionnaires, Mgr Philip Hugues, grand historien catholique britannique de ce siècle, écrit :

"Ce qui caractérisait ces révolutionnaires - comme tous les autres, car cela est aussi vrai des rebelles sociaux et politiques que des rebelles religieux -, c'était leur manie de vouloir que toute l'histoire future commence à partir de leur propre reconstruction de la gloire primitive telle qu'ils l'imaginaient.1"
Les principaux réformateurs avaient, pour la plupart, été prêtres, et il n'est pas surprenant qu'ils aient senti que c'était la messe qui importait et que c'était contre la messe, plus que contre le pape, que devait porter en priorité leur attaque.2 Ce point est souligné par l'historien allemand J. Lortz : "Pour l'Eglise catholique, l'événement le plus grave de la Réforme ne fut pas l'attaque contre le pape, mais le fait que ses mystères furent vidés de la source objective du pouvoir.3"

Tous les réformateurs ont nié que la messe fût un sacrifice et, à l'exception de Luther, ils rejetaient aussi la présence substantielle du Christ dans les espèces consacrées. La forme la plus élevée de la croyance protestante - pourtant bien éloignée de la doctrine catholique - était la théorie de la consubstantiation telle que l'entendait Luther. La plus basse était la perspective symboliste défendue par Zwingli, selon qui le pain et le vin ne font que "représenter" le corps et le sang du Christ. Zwingli et Calvin enseignaient tous deux que le corps et le sang du Christ ne sont pas objectivement contenus dans le sacrement et que, en conséquence, ils ne peuvent être offerts par le prêtre. Pour eux, en toute logique, le concept d'oblation eucharistique ne pouvait que constituer ce qu'ils appelaient une "adoration du pain", qu'ils ne cessèrent jamais de dénoncer.4

 

Henri VIII, chef suprême de l'Eglise d'Angleterre sur la terre

Le roi Henri VIII, lui, ne souhaitait pas changer la religion, il voulait simplement changer de femme. Si le pape avait accédé à la demande d'Henri VIII d'annuler son mariage avec Catherine d'Aragon, il n'y aurait pas eu de réforme protestante en Angleterre. La dispense accordée par Jules II, qui avait permis à Henri d'épouser la veuve de son frère Arthur, mort à quinze ans sans avoir consommé son mariage, était parfaitement valide, inattaquable en droit canon, et, en conséquence, l'annulation ne pouvait être accordée.

En 1531, Henri choisit pour nouvel archevêque de Cantorbéry le complaisant Thomas Cranmer, qui lui obéirait sans contestation. Ne souhaitant pas braquer Henri VIII plus que nécessaire, le pape Clément VII accepta cette nomination. En 1532, alors qu'il était en Europe pour le compte du roi, Cranmer - alors protestant convaincu - épousa secrètement la nièce d'André Osiandre, un pasteur luthérien. Sans doute Henri l'eût-il fait exécuter s'il avait entendu parler de ce mariage ou de son protestantisme. De son côté, Henri épousa le 25 janvier 1533 sa maîtresse, Anne Boleyn, alors enceinte. Par complaisance pour son royal bienfaiteur, Cranmer déclara invalide son mariage avec Catherine d'Aragon et valida le mariage avec Anne Boleyn. Le 11 juillet 1533, le pape Clément VII excommunia Henri et tous ceux qui avaient participé aux délibérations du tribunal de Cranmer.

En novembre 1534, le Parlement adopta la Loi de Primauté, nommant Henri "seul chef suprême sur la terre de l'Eglise d'Angleterre, appelée Anglicana Ecclesia". Le refus de prêter serment était considéré comme une trahison, passible de la peine de mort. Tous les évêques anglais se soumirent au roi, à l'exception de saint John Fisher, évêque de Rochester. On n'oubliera jamais la remarque féroce que fit le saint à propos de ses confrères évêques : "La forteresse est trahie par ceux-là mêmes qui devaient la défendre." Sir Thomas More préféra lui aussi mourir plutôt que d'accepter cette loi, tout comme un petit nombre de chartreux.

Henri avait rompu les ponts avec Rome, mais il ne voulait pas que l'Eglise dont il était le chef rompît avec la doctrine chrétienne. Si, entre 1536 et 1539, il supprima les monastères et saisit leurs terres et leurs biens, ce fut pour des raisons financières et non religieuses. Pour ce qui est de la messe, le roi était particulièrement conservateur et il n'y apporta aucun changement, sinon qu'il supprima toutes les prières pour le pape et toute commémoration de saint Thomas Becket.

Malgré la rupture avec Rome, la dissolution des monastères et autres mesures telles que l'abrogation de certains jours fériés, ce qui se passa en Angleterre sous Henri VIII ne fut en rien comparable à la réforme protestante en Europe continentale. Hilaire Belloc dit avec juste raison qu'il faudrait parler de "schisme" à ce propos. Il écrit :
"Ce ne fut pas un mouvement "hérétique" dans le sens habituel du terme : en effet, il ne combattait aucune des principales doctrines qui faisaient l'objet de si violentes attaques sur le continent de l'Europe. Sans doute refusait-il l'autorité du pape ; pourtant, non seulement il ne niait pas la transsubstantiation, la messe, l'ensemble du système sacramentel, mais il les affirmait vigoureusement. Pour simplifier les choses, on pourrait dire que, pour l'homme de la rue, dans sa vie quotidienne et ses devoirs religieux hebdomadaires, les choses semblaient continuer exactement comme auparavant.5"


L'accession au trône d'Edouard VI

Henri VIII mourut en janvier 1547 et eut pour successeur Edouard VI, le fils de sa troisième femme, Jane Seymour. Edouard VI, alors enfant maladif de neuf ans, ne fut que le pantin de son Conseil, dominé par les protestants. Ceux-ci, qui avaient caché leurs convictions profondes sous le règne de Henri, les affichaient désormais sans peur, n'ayant plus rien à craindre de les proclamer. Leur objectif était d'éliminer la foi catholique du pays, et le principal moyen qu'ils employèrent à cette fin fut de remplacer la messe latine immémoriale par un service protestant de communion en langue vulgaire. La rupture avec le pape n'avait en aucune façon satisfait Cranmer, aussi longtemps que demeurait le "papisme" et, sous ce vocable, ses consorts réformateurs et lui entendaient la messe. Elle seule importait, non seulement pour les catholiques, mais aussi pour les protestants. Cranmer haïssait la messe, comme si ce fût un ennemi vivant. Il attaquait, comme étant la racine du papisme, "la doctrine papiste de la transsubstantiation, de la présence réelle de la chair et du sang du Christ dans le sacrement de l'autel (ainsi qu'ils l'appellent), et le sacrifice et l'oblation du Christ faits par le prêtre pour le salut des vivants et des morts.6" On trouvera un exemple typique de cette haine des réformateurs pour la messe dans un passage de John Hooper, évêque de Gloucester :

"Je crois que la sainte Cène du Seigneur n'est pas un sacrifice mais simplement un souvenir et une commémoration de ce saint sacrifice de Jésus-Christ. En conséquence, elle ne devrait pas être adorée comme Dieu, ni comme le Christ qui y serait contenu ; celui-ci ne doit être adoré que dans la foi, sans tous les éléments corruptibles. Semblablement, je crois et je confesse que la messe papiste est une invention et un rite de l'homme, un sacrifice de l'Antéchrist et une apostasie du sacrifice de Jésus-Christ, c'est-à-dire de sa mort et de sa passion ; et que c'est un sépulcre puant et souillé qui cache et couvre le mérite du sang du Christ ; et qu'en conséquence la messe doit être abolie et la sainte Cène du Seigneur rétablie et restaurée dans sa perfection.7"

Malgré sa haine pour la messe, Cranmer décida de procéder prudemment même si, sous Edouard VI, les protestants contrôlaient effectivement le pouvoir politique du royaume. Il se rendit compte qu'il fallait faire disparaître la messe progressivement, en plusieurs années, pour éviter de provoquer une rébellion armée.

Dans l'étude la plus pénétrante écrite à ce jour sur les doctrines eucharistiques des réformateurs protestants, le père Francis Clark écrit :
"Dans un premier temps, pendant la période critique, Cranmer et ses amis virent que le plus sage était d'introduire la Réforme par étapes, pour préparer graduellement les esprits aux mesures plus radicales à venir. Parfois, la contrainte ou l'intimidation furent nécessaires pour étouffer l'opposition mais, de façon générale, leur politique consista d'abord à neutraliser la masse conservatrice du peuple, à la priver de ses dirigeants de conviction catholique, puis à l'accoutumer progressivement au nouveau système religieux.8"

 

Langue vulgaire et audibilité

Avant même que ne fussent imposés, en 1549, les nouveaux services, certaines parties de la messe étaient parfois célébrées en langue vulgaire ce qui, en soi, était déjà "une véritable révolution.9" Cela en changeait tout le caractère, et il apparut que c'était là un moyen efficace d'amener une transformation révolutionnaire : ainsi accoutumait-on en effet les gens à l'idée qu'il était possible d'apporter des changements radicaux à leur manière de célébrer. Le 12 mai 1548, une célébration entièrement en anglais - y compris la consécration - eut lieu à Westminster.10 Tout en insistant sur l'usage de la langue vulgaire, les réformateurs exigeaient que toute la communauté des fidèles pût entendre l'ensemble de la cérémonie, ce qui était en parfaite opposition avec la messe latine.

 

La communion sous les deux espèces

L'une des premières innovations importantes de Cranmer consista à imposer, à la fin de 1547, la pratique de la communion, pour les laïcs, sous les deux espèces. Tant en Angleterre que dans d'autres pays, beaucoup de catholiques commirent l'erreur, pour préserver la paix, de concéder ce changement sans opposition, sous prétexte qu'il s'agissait là d'une simple question de discipline. A ce sujet, le cardinal Gasquet écrit : "Le grand avantage que tirèrent les innovateurs de l'adoption de la communion sous les deux espèces en Angleterre fut l'occasion que cela leur donna de rompre avec l'ancien missel.11" Toute rupture de ce genre avec la Tradition diminuait l'impact des suivantes, de sorte que, lorsque furent introduits des changements qui ne relevaient pas uniquement de la discipline, la possibilité d'une résistance efficace s'en trouva considérablement diminuée.

 

Le Book of common prayer de 1549

Le 21 janvier 1549, la première loi d'uniformité imposa le premier Book of common prayer de Cranmer, à partir du dimanche de la Pentecôte (9 juin), à la place de tous les livres de liturgie latins traditionnels; en même temps, cette loi mettait en oeuvre l'objectif à long terme de Cranmer, qui était de remplacer la messe catholique par un service de communion protestant. Cranmer appela son nouveau service de communion : "la Cène du Seigneur et la sainte communion, communément appelées la messe." Ce titre est une description exacte de ce nouveau service qui, manifestement, était destiné à être une "commémoration" protestante de la Cène du Seigneur, mais qui ne contenait rien de spécifiquement hérétique et que l'on pouvait interpréter comme une messe.12 Dans le Prayer book de 1552, le titre du service de Cranmer ne comportait plus le mot "messe", ce qui marquait l'étape ultime de sa révolution liturgique : l'imposition d'un service qui ne pouvait être interprété autrement que comme une commémoration protestante.

Dans le Prayer book de 1549, le caractère protestant du service s'exprimait principalement par ce qu'il rejetait de la messe latine traditionnelle. Ainsi que l'explique le P. Clark :
"La liturgie du Book of common prayer de 1549 a fait l'objet d'études exhaustives et l'on s'accorde en général pour dire que sa principale différence par rapport avec le rite latin qu'il a remplacé est l'omission du langage sacrificiel.13"

L'assemblée pouvait entendre toutes les paroles du nouveau service, dit exclusivement en anglais, et la communion était donnée sous les deux espèces. Furent abolis le Judica me, où il est question du prêtre qui va monter "à l'autel de Dieu", ainsi que le Confiteor.14 Manifestement, la confession des péchés à Notre-Dame, aux saints et aux anges, à qui on demandait leur intercession, était incompatible avec la doctrine protestante de la justification. Comme Luther, Cranmer élimina complètement le rite de l'offertoire, avec ses multiples références au sacrifice et à la présence réelle. Furent également supprimés l'Orate fratres et la secrète. Si Luther abolit complètement le canon de la messe, Cranmer se contenta d'en supprimer les prières qui affirmaient spécifiquement le sacrifice et la présence réelle. Bien que les paroles de consécration aient été codifiées par le concile de Florence, Cranmer n'hésita pas, même là, à apporter des changements.15 Les mots "qui sera livré pour vous, faites ceci en mémoire de moi" (quod pro vobis tradetur, hoc facite in meam commemorationem) furent ajoutés à la consécration du pain et, dans la consécration du vin, les mots mysterium fidei furent supprimés. Aucune élévation n'était autorisée, pour exclure toute possibilité d'adoration. Ayant en abomination le Placeat tibi - spécifiquement sacrificiel - précédant la bénédiction finale, les réformateurs le supprimèrent.

 

Une catastrophe culturelle

Le passage d'une liturgie totalement en latin à une liturgie totalement en langue vulgaire provoqua une catastrophe culturelle aux conséquences incalculables : en effet, le peuple catholique se trouva complètement coupé de tout l'héritage de musique liturgique de la chrétienté occidentale, qui était entièrement en latin. Le Parlement adopta une loi - renforcée par une proclamation royale - ordonnant de rassembler, pour être détruits, tous les anciens livres de messe "superstitieux" que les récalcitrants continuaient à utiliser ; les évêques réformateurs recherchèrent diligemment les éléments de la "superstition" papiste qui avaient pu survivre dans la liturgie : les ornements sacerdotaux disparurent des églises et on peignit sur les murs des textes dirigés contre la présence réelle et la messe.16"

Le Pr J. J. Scarisbrick a fait une évaluation éloquente de la dévastation provoquée par la Réforme dans l'héritage culturel de la population d'Angleterre et du Pays de Galles :
"Entre 1536 et 1553, il y eut en Angleterre une vague de démolition et de pillage de choses belles et sacrées, irremplaçables, telle qu'il n'y en a probablement pas eu ni avant ni après... A la fin, des milliers d'autels avaient été enlevés, d'innombrables vitraux, statues et peintures murales avaient disparu, de nombreux choeurs et bibliothèques avaient été dispersés. Des milliers de calices, de ciboires, de croix et autres objets de ce genre avaient été vendus ou "mutilés" ... et un nombre incalculable de précieux vêtements liturgiques avaient été dégarnis ou saisis.17"


Les autels remplacés par des tables

Le remplacement des autels par des tables fut une étape supplémentaire qui s'inscrivit dans la droite ligne de politique liturgique des réformateurs continentaux. Calvin enseignait que, le Christ ayant accompli son sacrifice une fois pour toutes, Dieu "nous a donc donné une table pour manger sur elle, et non pas un autel pour sacrifier dessus. Il n'a point consacré des prêtres pour immoler des hosties mais il a institué des ministres pour distribuer la nourriture sacrée au peuple.18"

Après 1549, tous les autels de pierre sur lesquels le sacrifice de la messe avait été offert pendant des siècles furent détruits et remplacés par des tables de bois recouvertes d'une toile de lin et placées dans le chur.19 Le 24 novembre 1550, le Conseil du roi envoya une lettre à Ridley, évêque de Londres, pour lui expliquer :

"En premier lieu, la forme de la table incitera plus les simples à abandonner les opinions superstitieuses de la messe papiste pour les amener à la juste utilisation de la Cène du Seigneur. En effet, un autel est destiné à un sacrifice ; une table est destinée à ce que les hommes y prennent leur repas.20"

Les autels consacrés du sacrifice chrétien furent enlevés et détruits dans tout le pays. On peut sans exagération parler d'une "haine de la messe" de la part des prêtres et évêques apostats qui procédèrent à cette destruction sacrilège.21 Dans de nombreuses églises et cathédrales anciennes d'Angleterre, la table d'autel fut utilisée comme dallage, ou même comme marche sur laquelle passaient les fidèles entrant dans l'église pour assister au nouveau service en langue vulgaire. Dans le seul comté de Cambridge, on trouve encore plus de trente pierres d'autel ainsi placées pour que l'on marche dessus.22

 

Le Book of common prayer de 1552

En 1552, Cranmer imposa son second Prayer book, dans lequel avait été supprimé un certain nombre d'ambiguïtés contenues dans le rite de 1549, conservant simplement ce que, à l'évidence, il était destiné à être : un service de communion protestant. Cranmer invita en Angleterre un certain nombre des protestants continentaux les plus extrémistes et leur demanda leur avis. Le plus influent était un ancien dominicain allemand, Martin Bucer. Celui-ci rejetait toute présence eucharistique du Christ dans ou sous les formes du pain et du vin. Il fulminait contre le sacrifice de la messe, "rempli d'abominations que nous ne pouvons suffisamment détester : l'adoration du pain (artolatreia), donc chargée d'insulte infinie envers Dieu, dans laquelle on prenait du pain pour le Christ lui-même et on l'adorait, alors que son espèce demeurait intacte...23" Cranmer l'invita à compiler une critique du Prayer book de 1549. Celle-ci fut écrite en latin et on la connaît sous le nom de Censura. Le Prayer book de 1552 reprit au moins les deux-tiers de ses critiques, confirmation dramatique de l'influence exercée par Martin Bucer sur Cranmer.24

Bucer censura plusieurs aspects du rite de communion, dont il craignait qu'ils pussent être interprétés dans un sens catholique. Il insistait en particulier pour que le pain ne fût pas placé sur la langue du communiant, mais dans sa main :
"Je ne doute pas que l'usage de ne pas mettre ces sacrements dans les mains des fidèles aient été introduits en raison d'une double superstition : premièrement le faux honneur que l'on désirait manifester à ce sacrement, et secondement l'arrogance perverse de prêtres qui prétendaient à une plus grande sainteté que celle du peuple du Christ, en vertu de l'huile de la consécration. Il ne fait pas de doute, le Seigneur les a donnés, ces symboles sacrés, dans les mains des apôtres, et on ne peut lire les récits des anciens sans être absolument convaincu que ce fut là l'usage observé par les Eglises jusqu'à l'avènement de la tyrannie de l'Antéchrist romain.
"En conséquence, et considérant qu'il faut détester toute superstition de l'Antéchrist romain, et qu'il faut rappeler la simplicité du Christ, des apôtres et des Eglises anciennes, je désire qu'il soit ordonné aux pasteurs du peuple et à ceux qui l'instruisent d'enseigner fidèlement à ceux dont ils ont la charge qu'il est superstitieux et pervers de penser que les mains de ceux qui croient vraiment au Christ sont moins pures que leur bouche, ou que les mains des ministres sont plus saintes que celles des laïcs, de sorte qu'il serait pervers, ou moins approprié - ainsi que le pensait à tort le peuple ordinaire - que les laïcs reçoivent ces sacrements dans la main ; de même qu'il est superstitieux et pervers de penser que les ministres seraient autorisés à manipuler les sacrements mais que les laïcs ne seraient pas autorisés à le faire, et qu'ainsi il faudrait mettre le sacrement dans leur bouche, ce qui non seulement est étranger à ce qui a été institué par le Christ mais en outre offense la raison humaine...
"Bien que l'on puisse concéder, pendant un certain temps et pour ceux dont la foi est faible, qu'on leur donne le sacrement dans la bouche lorsqu'ils le désirent, pour autant qu'ils reçoivent un enseignement approprié, ils se conformeront bientôt au reste de l'Eglise et prendront le sacrement dans la main.25"

On voit donc que l'objection de Bucer à la façon traditionnelle de donner la communion est double : elle perpétue selon lui la croyance qu'il existe quelque différence essentielle entre un prêtre et un laïc, et entre le pain et le vin utilisés dans la communion et le pain et le vin ordinaires. Sa solution consiste à laisser facultative, dans un premier temps, la communion dans la main, mais cette option s'accompagne d'une campagne de propagande destinée à convaincre rapidement les fidèles.

 

Les signes de croix

Les réformateurs considéraient que les signes de croix ne pouvaient que conduire à la superstition, et ils les supprimèrent de la liturgie. Le canon de Sarum et d'autres missels anglais et gallois antérieurs à la Réforme comportaient vingt-six signes de croix. Dans le service de communion de 1549, Cranmer n'en conserva que deux. Et même cette concession à la tradition provoqua l'ire de Martin Bucer qui, dans sa Censura, exprima l'espoir "que seraient retirées les petites croix noires qui sont imprimées dans le livre à cet endroit.26" Dans son Prayer book de 1552, Cranmer les supprima.

 

La communion à genoux

Bien que, dans son Prayer book de 1552, il ait repris la plupart des censures de Bucer, Cranmer fut l'objet d'une attaque particulièrement virulente du réformateur John Knox, car il avait conservé la tradition de s'agenouiller pour la communion. Cranmer régla la question par un compromis bien dans sa manière : les communiants continueraient à s'agenouiller, mais la célèbre rubrique noire27 fut ajoutée au service de communion de 1552. Elle dit ceci :

"Afin que ledit agenouillement ne soit pas considéré ou estimé autrement, nous déclarons formellement qu'il ne faut pas y voir un signe d'adoration que l'on fait ou que l'on devrait faire à l'égard du pain et du vin sacramentels reçus corporellement à ce moment-là, ou à l'égard d'une quelconque présence réelle et essentielle comme étant la chair et le sang naturels du Christ. En effet, pour ce qui est du pain et du vin sacramentels, ceux-ci demeurent dans leurs substances tout-à-fait naturelles et ne peuvent en conséquence être adorés, car ce serait de l'idolâtrie, que tous les fidèles chrétiens doivent abhorrer. Et en ce qui concerne le corps et le sang naturels de notre Sauveur, le Christ, ils sont au ciel et non ici. Car il est contraire à la vérité du vrai corps naturel du Christ que d'être en plus d'un lieu en même temps."

Il est intéressant de noter la correspondance entre cette rubrique et les doctrines anathématisées dans deux canons de la treizième session du concile de Trente l'année précédente, en 1551. Il est indubitable que les termes employés dans cette rubrique noire constituaient un rejet explicite des canons 1 et 6 de cette session.28

A cette époque, Cranmer prenait soigneusement note des enseignements du concile de Trente et, en mars 1552, il écrivait à Calvin :

"Nos adversaires tiennent maintenant leurs conciles à Trente pour établir leurs erreurs... A ce que je sais, ils font des décrets concernant l'adoration de l'hostie ; aussi ne devons-nous rien négliger, non seulement pour préserver les autres de cette idolâtrie, mais aussi pour arriver entre nous à un accord sur la doctrine de ce sacrement.29"

On trouve la réponse de Cranmer au concile de Trente dans les Quarante-deux Articles de 1553 qui sont, pour l'essentiel, son oeuvre.30 Un passage de l'article XXIX est révélateur, en ce qui concerne tant la rubrique noire que la 13e session du concile de Trente. On lit en effet dans le paragraphe en question :

"La transsubstantiation, ou changement de la substance du pain et du vin en la substance du corps et du sang du Christ, ne saurait être prouvée par la sainte Ecriture ; au contraire, elle est incompatible avec ce que dit clairement l'Ecriture, et a donné lieu à de multiples superstitions. Attendu que la vérité de la nature humaine exige que le corps d'un seul et même homme ne puisse être en même temps en plusieurs lieux, mais doive nécessairement se trouver en un seul lieu déterminé, en conséquence, le corps du Christ ne peut, à un moment donné, se trouver en plusieurs lieux divers. Et du fait que, ainsi que l'enseigne l'Ecriture, le Christ a été élevé aux cieux et y demeurera jusqu'à la fin du monde, un fidèle ne devrait ni croire ni confesser ouvertement la présence réelle et corporelle (ainsi qu'ils l'appellent) de la chair et du sang du Christ dans le sacrement de la Cène du Seigneur. Le Christ n'a pas prescrit que le sacrement de la Cène du Seigneur fût conservé, porté, élevé ni adoré."31

Ainsi, le Prayer book de 1552 exposait très clairement la question de la vénération de l'Eucharistie dans la liturgie anglicane : elle était tenue pour une abomination et totalement interdite. On considérait que le pain et le vin distribués dans la sainte communion n'étaient pas différents du pain et du vin utilisés dans les repas ordinaires. La Cène du Seigneur était elle-même un repas, rien qu'un repas, et en tout cas pas un sacrifice - et c'est la raison pour laquelle les autels sacrificiels furent détruits et remplacés par des tables pour la Cène.

 

La restauration de la messe

Le commun des fidèles manifestait un ressentiment si amer à l'égard de la révolution liturgique de Cranmer que, dans la plupart des cas, seule la menace de sanction pouvait les inciter à assister aux nouveaux services.32 La profonde catholicité du peuple anglais se manifesta lorsque, à la mort d'Edouard VI, en 1553, Marie, fille très catholique de Catherine d'Aragon, monta sur le trône, décidée à restaurer la foi catholique quoi qu'il en coûtât. Le Pr. Bindoff, protestant, note que, peu après son accession au trône, "la messe était célébrée dans les églises de Londres, non pas sur ordre, mais pour répondre à la dévotion populaire, et de tous les coins du pays, l'on apprenait qu'elle se rétablissait sans opposition"33. On sortait des cachettes statues, crucifix, autels, vêtements liturgiques et vaisseaux sacrés et, dans la liesse, on les replaçait dans les églises qui, de temps immémorial, avaient fait la fierté des fidèles.
La restauration de la foi catholique sous Marie Tudor, qui avait rétabli l'union avec le pape, et le rétablissement de la messe latine traditionnelle furent accueillis avec enthousiasme par au moins 99% de la population d'Angleterre et du Pays de Galles. Le protestantisme imposé d'en haut n'avait rallié que moins d'un pour cent de celle-ci.34

 

Lex orandi, lex credendi

La reine Marie mourut le 17 novembre 1558, pendant que la messe était célébrée dans sa chambre. Pendant toute sa vie d'adulte, elle l'avait entendue quotidiennement. Elizabeth fut couronnée comme catholique et promit de régner en tant que telle ; pourtant, elle viola sa parole presque immédiatement et retourna au protestantisme qui lui permettait en effet d'ajouter, à son pouvoir politique, le contrôle religieux de ses sujets.

La nouvelle liturgie détruisit la foi ancienne lorsqu'elle fut de nouveau imposée sous le règne d'Elizabeth, avec des sanctions si sévères que, en dépit de sa nature manifestement non-catholique, il n'y eut qu'une poignée des catholiques les plus fervents pour refuser d'assister au nouveau service. Les six années au cours desquelles le protestantisme avait été imposé sous le règne d'Edouard VI n'avaient guère affecté la foi du peuple anglais ; en revanche, sous le règne d'Elizabeth, il fut contraint d'assister au service protestant pendant plusieurs décennies de suite (Elizabeth régna jusqu'en 1603). Le service de communion protestant officiel était célébré sur une table tournée vers le nord et non plus vers l'est, en totalité en langue vulgaire, toutes les prières étant audibles par la communauté des fidèles ; la communion était donnée sous les deux espèces et, sous la forme du pain, dans la main. Ce service ne comportait pas un seul mot, pas un seul geste ni une seule rubrique qui pût laisser croire que le pain et le vin reçus dans la communion fussent en quoi que ce soit différents du pain et du vin consommés lors d'un repas ordinaire ; que ce que l'on offrait fût un sacrifice et non simplement une prière de louange et d'action de grâces ; ni que l'homme qui présidait le service possédât des pouvoirs que n'avait pas le reste de la communauté. Au début, la plupart des fidèles n'allèrent qu'à contrecoeur au nouveau service anglais, puis, à mesure que passaient les années, l'axiome lex orandi, lex credendi finit par s'imposer, comme toujours à terme : la forme détermine le fond. Les gens étaient contraints de prier comme des protestants, et ils devinrent protestants.

Mgr Hugues fait remarquer avec juste raison :

"Aujourd'hui encore, un catholique a beaucoup de mal à comprendre que ces théories et ces rites furent, du moins dans une très large mesure, l'oeuvre d'hommes qui étaient des prêtres, qui non seulement avaient reçu les sacrements catholiques, mais avaient célébré la messe, et qui en étaient désormais à se satisfaire de cette situation sans un signe de regret pour la précédente.35"

En outre, il dit explicitement que, en Angleterre, le catholicisme fut détruit par la réforme liturgique de Thomas Cranmer, à nouveau imposée sous le règne d'Elizabeth.

"Dès lors que ces nouveaux rites sacramentels, par exemple, furent devenus l'habitude du peuple anglais, la substance de la réforme doctrinale, désormais victorieuse en Europe du Nord, devait nécessairement transformer l'Angleterre à son tour. Presque insensiblement, à mesure que passaient les années, les croyances enchâssées dans les rites anciens - désormais tombés en désuétude - et que ces rites gardaient vivantes dans l'esprit et l'affection des hommes, allaient disparaître sans qu'il fût besoin d'une campagne missionnaire systématique pour en prêcher l'abandon."36

Pourtant, certains catholiques restèrent fidèles, refusant tout compromis. En particulier, ceux qui préservèrent la foi en Grande-Bretagne furent les jeunes qui allèrent se former dans les séminaires d'Europe. Ils revenaient pour donner la messe au peuple et, bien trop souvent, donner leur vie pour la messe, la messe latine traditionnelle que l'on trouve dans le missel de saint Pie V. Les vainqueurs avaient pris possession des églises dans lesquelles la messe immémoriale avait été célébrée pendant des siècles, mais les catholiques fidèles possédaient la messe, et c'était la messe qui importait.


NOTES

1. P. HUGUES : The Reformation in England, Londres 1950, vol. II, p. 158.
2. F. CLARK : Eucharistic Sacrifice and the Reformation, Oxford 1967, p. 107.
3. J. LORZ : Die Reformation in Deutschland, Fribourg-en-Brisgau 1941, vol. II, p. 229. [La Réforme de Luther - coll. "Théologie sans frontières", Cerf 1970.]
4. Op. cit. note 2, pp. 111-112.
5. Gustave CONSTANT : The Reformation in England, Londres 1934, p. 8. [La Réforme en Angleterre, vol. I, Perrin 1930.]
6. T. CRANMER : Works, Cambridge 1844, vol. I, p. 6.
7. J. HOOPER : Later Writings, Cambridge 1852, p. 32.
8. Op. cit., note 2, p. 194.
9. Op. cit., note 1, p. 113.
10. F. GASQUET et H. BISHOP : Edward VI and the Book of common prayer, Londres 1890, p. 102.
11. Ibid. p. 79.
12. Cette ambiguïté est soulignée par le P. Francis Clark :
"On ne pouvait convaincre le premier Prayer book d'Edouard VI d'hérésie manifeste car il était adroitement conçu et ne contenait aucun rejet explicite de la doctrine antérieure à la Réforme. Ainsi que le dit un spécialiste des questions anglicanes, c'était "une ingénieuse composition ambigüe" dont les termes avaient été choisis à dessein de façon à ce que les plus conservateurs pussent y placer leur interprétation et convaincre leur conscience de l'utiliser, alors que les Réformateurs l'interpréteraient dans leur sens à eux et y verraient un instrument pour passer à l'étape suivante de la révolution religieuse." (Op. cit. note 2, p. 282.)
13. Ibid. p. 183.
14. E. C. MESSENGER : The Reformation, the mass and the priesthood, Londres 1936, vol. I. Le chapitre VII de ce livre présente une comparaison détaillée des réformes de Luther et de Cranmer.
15. H. DENZIGER : Enchiridion Symbolorum (Editio 31), n° 715.
16. Op. cit. note 2, p. 187.
17. J. J. SCARISBRICK : The Reformation and the English people, Oxford 1984, pp. 85 & 87.
18. J. CALVIN : Institution de la religion chrétienne, Livre IV, XVIII, n. 12, p. 411, Labor et Fides, Genève.
19. Op. cit. note 1, pp. 120-121.
20. Op. cit. note 6, vol. II, Cambridge 1846, pp. 524-525.
21. On trouvera un exemple typique de leur attitude dans les instructions données en 1571 - sous le règne d'Elizabeth I - par Edmund Grindal, évêque d'York, à ses marguilliers. Non seulement il insistait pour que tout objet pouvant évoquer le souvenir de la messe fût détruit ou mutilé et que tous les autels rétablis sous le règne de Marie Tudor fussent enlevés, mais encore il ordonnait que l'on fît disparaître toute trace de leur existence même :
"Les marguilliers veilleront, dans leurs églises et chapelles, à ce que tous les autels soient complètement détruits et leurs restes enlevés, jusqu'aux fondations mêmes, et que l'endroit où ils avaient été scellés soit pavé, et que le mur contre lequel ils s'appuyaient soit blanchi et uniformisé avec le reste, afin que n'apparaisse aucune brèche ni rupture. Les pierres d'autel seront brisées et mutilées, et affectées à un quelconque usage profane.
"Les marguilliers et les ministres veilleront en outre à ce que les antiphonaires, les livres de messe, les grilles, portails, processionnaux, manuels, légendaires et tous les autres livres qui appartenaient autrefois à leurs églises ou chapelles, qui servaient pour le service latin superstitieux, soient complètement mutilés, déchirés et supprimés. Et que tous les ornements, aubes, tuniques, étoles, fanons, manipules, ciboires, patènes, clochettes, sonnettes, encensoirs, chrismatoires, chandeliers, bénitiers et autres récipients contenant de l'eau bénite, images et autres reliques et monuments de superstition soient complètement mutilés, brisés et détruits.
"Deux fois par an, ils communiqueront à l'ordinaire (l'évêque) le nom de toutes les personnes favorables au pouvoir romain et étranger, qui entendent ou disent des messes ou tout autre service latin, qui reçoivent des prêtres papistes vagabonds ou toute autre personne désapprouvant notoirement la vraie religion." (In : T.E. BRIDGETT : A History of the Eucharist in Great Britain, Londres 1908, p. 63.)
22. Ibid. p. 65.
23. E. C. WHITAKER : Martin Bucer and the Book of common prayer, Londres 1974, p. 58. Cet ouvrage contient le texte complet de la Censura en latin et en anglais.
24. Op. cit. note 2, p. 123.
25. Op. cit. note 23, pp. 34-36.
26. Ibid. p. 60.
27. L'expression rubrique noire ne date que du XIXe siècle, lorsque fut introduite la pratique d'imprimer en rouge les rubriques du Book of common prayer ; cette déclaration fut imprimée en noir pour souligner qu'il ne s'agissait pas d'une rubrique à proprement parler. Dans les éditions modernes en deux couleurs du Book of common prayer, elle est imprimée en rouge.
28. Canon 1 :
"Si quelqu'un nie que le Corps et le Sang de Notre-Seigneur Jésus-Christ, avec son âme et la divinité, et par conséquent Jésus-Christ tout entier, soit contenu véritablement, réellement et substantiellement au sacrement de la très sainte Eucharistie; mais dit qu'il y est seulement comme dans un signe, ou bien en figure, ou en vertu : qu'il soit anathème."
Canon 6 :
"Si quelqu'un dit que Jésus-Christ, Fils unique de Dieu, ne doit pas être adoré au saint sacrement de l'Eucharistie du culte de latrie, même extérieur ; et que par conséquent il ne faut pas l'honorer d'une fête solennelle et particulière, ni le porter avec pompe et appareil aux processions, selon la louable coutume et l'usage universel de la sainte Eglise; ou qu'il ne faut pas l'exposer publiquement au peuple pour être adoré; et que ceux qui l'adorent sont idolâtres : qu'il soit anathème."
Histoire du concile de Trente, coll. Migne, T. I, p. 53.
29. Op. cit., note 20, pp. 432-433.
30. E. C. GIBSON : The thirty-nine Articles of the Church of England, Londres 1898, p. 12.
31. Ibid., pp. 83-84.
32. Mgr Philip Hugues écrit :
"La nouvelle loi de 1552 commençait par déplorer que, nonobstant "l'ordre très divin formulé par l'autorité du Parlement pour la prière commune dans la langue maternelle" et "très avantageux pour toutes les bonnes gens" qui désirent vivre une vie chrétienne, "un grand nombre de gens, dans diverses parties de ce royaume... refusent de se rendre à leur église paroissiale et autres lieux où la prière commune ... est utilisée". Dès lors, la non-assistance aux services des dimanches et jours de fête, "pour y demeurer dans l'ordre et la dignité pendant le temps de la prière commune", devint un délit... En outre, un autre délit fut institué : toute personne convaincue d'assister à des services de prière, "administration de sacrements, ordination de ministres dans les églises" ou tout autre rite, quel qu'il soit, effectués autrement que selon ce qui est prévu dans le Prayer book, sera condamnée à la prison pour six mois à la première infraction, un an à la seconde, et à vie à la troisième. Telles sont les premières sanctions appliquées en Angleterre pour ce nouveau crime que d'écouter la messe, ou de recevoir les sacrements tels qu'ils avaient été reçus depuis que saint Augustin était venu convertir les Anglais, près d'un millénaire plus tôt." (C'est moi qui souligne.) (Op. cit., note 1, p. 126.)
33. S. T. BINDOFF : Tudor England, Londres 1952, p. 168.
34. Owen Chadwick, historien protestant, écrit :
"La Réforme en Angleterre n'avait suscité le ralliement authentique que de quelques théologiens érudits et de quelques marchands et autres membres de la classe moyenne qui possédaient quelque instruction, en particulier à Londres, et elle était appuyée, pour des motifs moins francs, par de puissants membres de la noblesse." (In : Owen CHADWICK : The Reformation, Londres 1973, pp. 122-123. )
Cf. aussi P. HUGUES : op. cit. note 1, vol. III, p. 50.
35. Op. cit., note 1, vol. III, p. 89.
36. Op. cit., note 20, p. 111.